28 août 2006

Rouge colère et pôle wallon


Elio Di Rupo a donc frappé fort. Un discours de rentrée pugnace, agressif, en un mot comme en cent, un discours de campagne. Les téléspectateurs (comme quoi l’image apporte en elle même une information) auront particulièrement été frappés par la gestuelle et la grimace de colère du président du PS. Mi août pourtant (10 jours avant) son entourage annonçait une rentrée en demi teinte : pas d’interviews tonitruantes dans la presse, pas de passage radio. « La vraie rentrée sera pour les fêtes de Wallonie (mi septembre) » disait on alors dans l’équipe présidentielle. Pourquoi le président du PS est il sorti de ses gonds plus tôt que prévu ? Pour répondre à Yves Leterme d’abord. Cela fait des mois que les deux hommes se préparent à un face à face communautaire qu’ils savent inéluctables depuis un débat devant des étudiants où l’un et l’autre ont découvert le fossé qui les séparait. L’impact de l’interview accordé à Libération ne pouvait pas rester sans réponse.
Pour donner une correction à ce garnement de Charles Michel ensuite. La sortie du porte parole réformateur sur les ondes de Bel RTL au matin de la commission justice réunie en urgence pour étudier le cas de Termonde (voir ci dessous) a choqué les socialistes. Ils y voient un manque de solidarité gouvernementale. En indiquant que « cela doit rester un fait isolé », le président du PS adresse un avertissement à peine codé au président du MR que l’on pourrait traduire ainsi: « retenez vos troupes ou je vous débarque du fédéral en 2007 ». Elio Di Rupo songe-t-il déjà à cet échéance et à la possibilité d’une coalition rouge-orange à tous les niveaux de pouvoir ? C’est d’autant plus probable que la position serait beaucoup plus confortable. Didier Reynders se laissera-il impressionné ? Il est probable que la réponse sera non. Entre le président du PS et celui du MR il y a désormais une relation de défiance assumée. En privé, le premier reproche au second de ne pas le ménager, lequel rétorque que son prédécesseur à la Rue de Naples, beaucoup plus conciliant, ne fût pas récompensé d’avoir été plus proche que lui du boulevard de l’empereur. Sous nos yeux se dessine donc un clivage structurant qui doit autant aux hommes et à leurs relations qu’à la stratégie électorale. D’un coté le PS et le CDH, de l’autre le MR et Ecolo. Dans cette configuration où la majorité wallonne devient la majorité de référence, ceux qui sont dans l’opposition à la région ont tout intérêt à jouer dans leurs discours la carte de l’alternance et à mettre l’accent sur les affaires qui touchent le PS. La vraie difficulté sera donc pour le CDH, qui va devoir dans la campagne communale naviguer adroitement entre la solidarité wallonne (on n’insulte par l’avenir surtout si celui-ci vous ouvre la porte du fédéral) et l’idée que le CDH, à l’inverse de son ancêtre PSC, incarnait un nouveau mode de gouvernance difficilement conciliable avec les dérives carolos ou namuroises. En d’autres termes, coller au PS sur les dossiers régionaux et communautaire, s’en démarquer sur le terrain « éthique », au risque de sembler faire le grand écart. Une position naguère adoptée par Ecolo. Ce qu’on pourrait appeler le « pôle wallon » remplace le pôle des gauches. Et on notera une constante : dans un « pôle » c’est toujours le plus grand qui possède un pouvoir attractif.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Le test à Bruxelles Ville ...
Milquet Bourgmestre ??? difficilement conciliable au travers d'une alliance avec le PS .

Encore faudra-t-il voir si tel est son ambition ?

A mon avis la "technique" du grand "écart est dangereuse pour le CDH car elle manque de crédibilité ..
Ecolo en sait quelque chose et Reynders aussi..

Voilà pourquoi peut-être DI RUPO "s'énerve" .

Joe a dit…

première visite et première lecture très instructive. Je comprends mieux le rapprochement MR Ecolo, qui n'est pas sot puisque sociologiquement, l'électorat des deux partis est proche (classe moyenne principalement, hautes études). Et si c'était le PS qui était débarqué? Reynders ne devrait pas fermer la porte au cdh. L'opinion publique semble accepter plus facilement les tripartites aujourd'hui qu'il y a vingt ans.